Basket/ L'Elan brisé des béarnais

Publié le par Maxime Debs

Pau de chagrin


Un colosse aux pieds d'argile. Voilà à quoi ressemble aujourd'hui Pau-Lacq-Orthez. Ce soir, à Cholet, l'Elan Béarnais, neuf fois champion de France, pourrait officialiser une descente inimaginable il y a encore deux ans...


Claude Bergeaud avait jusqu'à la semaine dernière pour monter un budget en vue de la saison prochaine. Le directeur général du club béarnais en a transmis deux à la ligue. L'un, en cas de maintien en Pro A. L'autre, en cas, désormais plus probable, d'une relégation en Pro B.
A trois journées de la fin, le club palois, monument du basket français, en est bien là. Quasi condamné. Une réalité à laquelle le Béarn tout entier a déjà commencé à se préparer. « Une défaite à Cholet, et on y est. » Fred Moncade ne peux pas mieux résumer. Palois de souche, le meneur a tout connu au Palais des sports. Du titre de champion de France en 1998, alors qu'il n'était qu'un espoir, en passant par l'Europe. Jusqu'à cette « saison noire ». Revenu cette année après dix ans d'exil, Frédéric Moncade est un témoin de la grande époque. Il pèse aussi ses mots lorsqu'il dit que « l'Elan, ce club chargé d'histoire, n'a plus rien à voir avec son passé ».


Un Elan brisé

Comment en est-on arrivé là? Pour lui, « il faudrait bien plus qu'un article, sans doute un livre pour l'expliquer ». Au bord du dépôt de bilan en début de saison, le club a d'abord dû trouver des fonds avant de composer son effectif. Claude Bergeaud y est même allé de l'hypothèque de sa maison.
 Deux-trois erreurs de recrutement plus tard, un Américain déserteur en décembre (parti pour les vacances de Noël et qui n'est jamais revenu) et l'Elan s'est vite trouvé brisé, perdant notamment les onze premiers matches de la saison. « Il a fallu lancer les jeunes qui ont hérité d'une situation bien compliquée, explique l'entraîneur, Laurent Mopsus. Aujourd'hui, on attend d'eux un sans-faute pour sauver ce qu'il reste à sauver. Sont-ils vraiment armés pour ce combat? On sera très vite fixés. » Du haut de ses 34 ans, Alain Digbeu sait qu' « à 20 ans, un gamin a d'autres rêves dans la tête que de lutter dans les abysses du championnat ». L'ancien international est justement sorti de son chômage en février pour les recadrer. Depuis son arrivée, l'équipe tourne mieux (quatre victoires en neuf matchs). Le public déçu est revenu. Claude Bergeaud regarde les chiffres: « Depuis le 1er janvier, 7000 personnes en moyenne remplissent la salle. On n'a pas le droit de lâcher maintenant ».

Frédéric Fauthoux est une figure locale historique qui a donné de sa sueur au club pendant plus d'une décennie. Et pourtant. Avant Noël, il a préféré gardé ses distances avec le Palais: « ça me faisait mal de voir le club toucher le fond. Je ne voulais pas assister à ça. » Devenu adjoint au sports à la mairie « Petitou » a depuis repris place occasionnellement dans les tribunes. Et devrait être des convives pour la réception de Hyères-Toulon, samedi. En fonction du résultat de ce soir, Pau sera ou ne sera peut-être déjà plus.

Le Landais choisit l'espoir: « Tockey si gauses vous dirait un Béranais. En gros, ça signifie Touche si tu oses. L'équipe, je pense, va vendre chèrement sa peau. »


L'image d'une entreprise en faillite

La région n'en attend pas moins. Elle qui souffre déjà suffisamment. Les 350 employés de l'usine chimique Celanese, à quelques encablures de Pau, en savent quelque chose. Eux qui vont perdre leur emploi après l'annonce de fermeture de leur site en mars. La semaine dernière, Claude Bergeaud a tenu à ce que ses joueurs viennent à leur rencontre. Une initiative du « Professeur » qui amène à considérer une réalité toute autre.
Club aux multiples titres (voir encadré ci-contre), Pau est devenu aussi, en quelques années, une entreprise au train de vie imposant. « Il y a trois ans, avec l'Euroligue, on proposait 28 matches par saison au public contre 15 aujourd'hui. Avec toujours 17 salariés à payer. Une relégation, une nouvelle baisse de budget et je vous laisse imaginer. » . Toujours est il: après Limoges, au début des années 2000, l'élite du basket français pourrait être amputée d'un autre de ses clubs historiques, dès ce soir à Cholet. Un cruel manque de Pau pourrait alors se faire sentir sur les parquets de Pro A.

Maxime DEBS.

(Paru en dernière page d'Aujourd'hui Sport, le 5 mai 2009)

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